Post by mauriceBonjour,
Et tout d'abord, merci pour vos réponses.
Personnellement, je trouve qu'il y a beaucoup de flou juridique en la
matière. Bon nombre de salariés disposent aujourd'hui de 120h, et les
employeurs se limitent essentiellement à leur obligation annuelle
d'information (aucune information sur comment les utiliser, la
procédure pour ce faire, etc.). Concernant ce dernier point, la
société qui m'emploie m'a envoyé 2 fois l'information sur mon quota
d'heures DIF pour l'année 2012... un des courriers faisant état de ce
quota au 1er janvier 2012, et l'autre au 01/12/2012 (compte tenu que
j'avais demandé 1 formation de 3j en fin décembre...peut-être une
façon justement de se couvrir en bloquant mon quota d'heures DIF dans
le cas où celui-ci serait revu à la baisse sans qu'il ait été utilisé,
juste demandé au cours de l'année civile...) Bonne journée,
Christophe
Bonsoir,
Les réponses qui vous ont été données sont correctes dans les grandes
lignes.
L'entreprise informe les salariés de l'état de leur compteur au moins une
fois par an (sans autre précision, il faut comprendre au moins une fois
par année civile), quand elle le souhaite. Certaines ont aligné cette
information sur leur exercice comptable, d'autres sur Janvier ou Février
(premier mois suivant la publication au JO)...
Lorsque l'employeur ne répond pas dans le délai d'un mois à compter de la
réception de la demande, il est réputé être d'accord avec le choix de
l'action de formation et ce, quels que soient les accords de restriction
des actions (moins avantageux pour le salarié) pouvant exister dans
l'entreprise ou la branche. De plus, en l'absence de réponse, c'est la
solution par défaut d'une formation hors temps de travail (avec
rémunération du temps de formation à hauteur de 50% du salaire net) qui
est automatiquement retenue. Sauf mention contraire dans la CCN ou un
accord collectif qui, pour cette seconde question, resterait applicable.
Il n'a pas d'autre choix que de programmer la formation. La meilleure
démarche à suivre pour le salarié, afin de tout vérrouiller et de
recueillir toutes les traces utiles, est donc de demander à l'organisme de
formation une convention de formation (dans une lettre à laquelle sera
jointe une copie la demande faite à l'employeur et de son accusé de
réception - L'utilisation du recommandé pour toutes les correspondances
est essentielle si vous avez le moindre doute sur la probité de
l'employeur). Une fois la convention reçue, le salarié peut l'envoyer à
l'employeur, avec une copie de sa demande initiale et de son AR, en le
mettant (gentiment mais fermement) en demeure de bien vouloir en retourner
toutes les copies signées, dans un délai donné (8 jours, 15 jours... à
voir raisonnablement selon la date de la formation), aux parties
concernées. Le salarié ayant fait tout le travail, et l'employeur n'ayant
qu'à signer, il lui sera difficile d'échapper à son obligation.
A défaut de mention légale, le compteur de DIF doit être décompté à la
réalisation de l'action, du nombre exact d'heures de formation effectuées.
En tout état de cause, la date sur les feuilles de présence à la formation
dument signées par le salarié fait foi. S'il s'agit d'une formation de
trois jours dont deux journées se déroulent en décembre 2011, et une en
Janvier 2012, 14 heures sont à déduire en 2011, et 7 en 2012.
Le salarié qui maxe son compteur à 120h sans l'utiliser perd le bénéfice
du cumul des heures des années suivantes, sans compensation salariale (le
code du travail l'indique en L6323-quelquechose).
Mais si cet événement s'est produit parce que l'employeur n'a pas répondu
dans les temps et a fait le mort, malgré le fait que le salarié ait suivi
la procédure que je suggère, ou autre démarche équivalente produisant le
même genre de preuves, alors le salarié peut démontrer un préjudice causé
par l'employeur. En effet, il possède les preuves que celui-ci a porté
atteinte à son droit à la formation tout au long de la vie. Ce préjudice
est, au minimum, la compensation des heures de DIF perdues, mais un avocat
intelligent saura démontrer quelques autres préjudices : retard dans
l'adaptation à l'évolution de l'emploi, perte d'employabilité, retard
automatiquement pris dans l'évolution ou le changement de carrière, perte
de valeur ajoutée, de productivité, et donc d'un salaire fixe et/ou
variable plus élevé, etc... La rupture du contrat aux torts de l'employeur
est même envisageable, puisque le fait de ne pas programmer la formation
pour laquelle il "était d'accord" est une violation du code du travail, et
donc d'une de ses obligations contractuelles fondamentales.
Là encore, une lettre RAR polie mais ferme envoyée à l'employeur évoquant
à demi mot ces potentielles petites tracasseries peut vite amener à un
accord pévoyant la restitution des heures, et la programmation rapide de
la formation souhaitée...
Les employeurs récalcitrants, auxquels rien ne fait entendre raison, une
fois debout devant leurs juges, essaient souvent de se justifier par des
motifs de manque de temps, d'argent, d'organisation, par l'impossibilité
de se séparer ne serait-ce que 20 heures de leur salarié, etc... Mais le
DIF n'est pas les 35 heures. Il ne vient pas d'un texte imposé par tel ou
tel ministre. La loi est la transcription dans le code d'un Accord
National Interprofessionnel conclu entre les syndicats employeurs et
salariés qui ont pris en compte et négocié tous ces facteurs. Longuement
négocié (à tel point que la négociation lancée par un gouvernement de
gauche a finalement donné lieu à une loi écrite et votée par un
gouvernement de droite). Ces employeurs retors feraient bien de s'en
souvenir, car les avocats de salariés ne manquant pas de l'évoquer, et les
conseillers prud'homaux ont vite fait de relever la mauvaise foi des
premiers. En pratique, le seul motif de refus valable est le choix de
l'action de formation, et il faut que ce refus soit signifié de manière
motivée et dans les délais. La charge de la preuve revient à l'employeur
si le salarié est en mesure de prouver l'existence et la date de sa
demande.
Si vous avez assez de traces de votre demande initiale, et de l'inaction
volontaire de l'employeur, vous pouvez passer directement à la dernière
phase de négociation (restitution des heures et programmation de la
formation au plus tot). Sinon, refaites donc votre demande cette année de
manière plus formelle. Quelques "grands mots" utilisés dans un courrier
recommandé font souvent plier les géants aux pieds d'argile.
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Xavier Hugonet